La Biblinsa a participé au dernier numéro du BIIP -Bulletin Insalien d’Information Périodique- en proposant un article sur 3 de nos coups de cœur de cette rentrée…
Nous avons retranscrit l’article en question ci dessous :
Cet automne, à la Biblinsa, monstres et sorcières sont de sortie. En effet, la rentrée nous a apporté son lot de nouveautés, parfois horrifiantes mais surtout fascinantes. Nous avons choisi de vous présenter trois pépites littéraires, trois coups de cœur, qui ont tous le point commun de parler de monstres et/ou de sorcières, ces créatures de l’imaginaire tantôt inquiétantes, tantôt bienveillantes. Ces créatures peuvent nous aider à penser le monde différemment et à réfléchir sur le pouvoir et les conséquences de l’imaginaire sur le réel. Ces ouvrages parlent de destins brisés et de renouveau. De tragédies et de luttes. En nous secouant, en nous donnant à voir des situations terribles et surtout l’énergie de celles et ceux qui les vivent et en sortent transformé·e·s, il y a de fortes chances pour que l’un de ces trois livres bouleverse votre vie et votre vision du monde et du réel.
« My Absolute Darling » de Gabriel Tallent
« À quatorze ans, Turtle Alveston arpente les bois de la côte nord de la Californie avec un fusil et un pistolet pour seuls compagnons. Elle trouve refuge sur les plages et les îlots rocheux qu’elle parcourt sur des kilomètres. Mais si le monde extérieur s’ouvre à elle dans toute son immensité, son univers familial est étroit et menaçant : Turtle a grandi seule, sous la coupe d’un père charismatique et abusif. Sa vie sociale est confinée au collège, et elle repousse quiconque essaye de percer sa carapace. Jusqu’au jour où elle rencontre Jacob, un lycéen blagueur qu’elle intrigue et fascine à la fois. Poussée par cette amitié naissante, Turtle décide alors d’échapper à son père et plonge dans une aventure sans retour où elle mettra en jeu sa liberté et sa survie. » (Gallmeister)
Une relation père-fille bouleversante et terrifiante. Ce premier roman de Gabriel Tallent est une ode à la nature et aux grands espaces et vous transportera avec un suspens glaçant dans la quête libératrice d’une jeune fille qui reprend le pouvoir dans sa vie. Ni tout noir, ni tout blanc, ce roman a la force de montrer les subtilités d’un monstre, horrible et en même temps aimant, criminel et en même temps attachant. C’est ce flou qui plane autour du monstre qui réfrène les velléités émancipatrices de l’héroïne. Car rien n’est jamais ni tout noir, ni tout blanc. Ce roman le donne à lire de façon merveilleuse.
Chloé L., pour la Biblinsa.
TALLENT, Gabriel, 2018. My absolute darling: roman. Paris, France : Gallmeister. ISBN 978-2-35178-168-5. Dispo à la Biblinsa : R TAL
« Moi, ce que j’aime, c’est les monstres » de Emil Ferris
« Chicago, fin des années 1960. Karen Reyes, dix ans, adore les fantômes, les vampires et autres morts-vivants. Elle s’imagine même être un loup-garou: plus facile, ici, d’être un monstre que d’être une femme. Le jour de la Saint-Valentin, sa voisine, la belle Anka Silverberg, se suicide d’une balle dans le cœur. Mais Karen n’y croit pas et décide d’élucider ce mystère. Elle va vite découvrir qu’entre le passé d’Anka dans l’Allemagne nazie, son propre quartier prêt à s’embraser et les secrets tapis dans l’ombre de son quotidien, les monstres, bons ou mauvais, sont des êtres comme les autres, ambigus, torturés et fascinants. Journal intime d’une artiste prodige, Moi, ce que j’aime, c’est les monstres est un kaléidoscope brillant d’énergie et d’émotions, l’histoire magnifiquement contée d’une fascinante enfant. » (Monsieur Toussaint Louverture)
Une œuvre magistrale et grandiose. On l’ouvre et on ne peut plus le refermer. L’autrice mettra 6 ans à écrire ce roman monde graphique de 400 pages (son premier) après avoir été frappée de paralysie et passé de longs jours en rééducation. Ce récit témoigne de la force et de la nécessité de partager sa souffrance pour s’en sortir. D’une richesse visuelle impressionnante, sous la forme d’une autobiographie fictive, cet ouvrage s’adresse à celles et ceux qui, comme Karen, se considèrent comme des monstres car perçu·e·s comme différent·e·s. Tantôt intime, tantôt historique, tantôt policière, cette histoire et ces dessins généreux veulent en effet mettre en avant les autres, les minorités, celles et ceux qui ne rentrent pas dans les cases normées de la société. Armée de son stylo Bic, Emil Ferris déroule un monstrueux tapis rouge et vous en mettra plein les yeux.
Chloé L., pour la Biblinsa.
FERRIS, Emil, 2018. Moi, ce que j’aime, c’est les monstres. Livre premier. Cenon, France : Monsieur Toussaint Louverture. ISBN 979-10-90724-47-1. Dispo à la Biblinsa : BDP FER
« Sorcières : la puissance invaincue des femmes » de Mona Chollet
« Nous sommes les petites-filles des sorcières que vous n’avez pas réussi à brûler. » (slogan féministe)
Dans Sorcières, la puissance invaincue des femmes, paru chez Zones Éditions, l’écrivaine et journaliste Mona Chollet réexamine l’histoire de la chasse aux sorcières. Considérant cet épisode comme un crime de masse misogyne, l’autrice analyse pourquoi, aujourd’hui encore, la femme libre, célibataire, sans enfant et/ou vieille, celle qui n’a pas besoin des hommes pour exister, celle qui échappe à leur contrôle, suscite la peur ?
« Qu’elles vendent des grimoires sur Etsy, postent des photos de leur autel orné de cristaux sur Instagram ou se rassemblent pour jeter des sorts à Donald Trump, les sorcières sont partout. Davantage encore que leurs aînées des années 1970, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure. La sorcière est à la fois la victime absolue, celle pour qui on réclame justice, et la rebelle obstinée, insaisissable. Mais qui étaient au juste celles qui, dans l’Europe de la Renaissance, ont été accusées de sorcellerie ? Quels types de femme ces siècles de terreur ont-ils censurés, éliminés, réprimés ?
Ce livre en explore trois et examine ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos préjugés et nos représentations : la femme indépendante — puisque les veuves et les célibataires furent particulièrement visées ; la femme sans enfant — puisque l’époque des chasses a marqué la fin de la tolérance pour celles qui prétendaient contrôler leur fécondité ; et la femme âgée – devenue, et restée depuis, un objet d’horreur.
Enfin, il sera aussi question de la vision du monde que la traque des sorcières a servi à promouvoir, du rapport guerrier qui s’est développé alors tant à l’égard des femmes que de la nature : une double malédiction qui reste à lever. » (Zones Éditions)
Sorcières est un livre stimulant. En convoquant des modèles de femmes qui vivent et agissent en dehors du modèle patriarcal dominant et avilissant, Mona Chollet inspire les femmes et les encourage à se réapproprier leur propre force.
Le travail de Mona Chollet est très documenté et son livre est riche de nombreuses références bibliographiques qui offrent l’occasion d’alimenter un élan de réappropriation, d’autonomisation.
« La force des stéréotypes et des préjugés peut avoir quelque chose de profondément démoralisant ; mais elle offre aussi une chance, celle de tracer de nouveaux chemins. Elle donne l’occasion de goûter aux joies de l’insolence, de l’aventure, de l’invention, et d’observer qui se déclare prêt à en être – en évitant de perdre son temps avec les autres. Elle invite à se montrer iconoclaste, au sens premier du terme, c’est-à-dire à briser les anciennes images et la malédiction qu’elles colportent. » (extrait de CHOLLET, Mona, 2018. Sorcières. La puissance invaincue des femmes. Paris : Zones).
Émilie M., pour la Biblinsa.
CHOLLET, Mona, 2018. Sorcières: la puissance invaincue des femmes. Paris, France : Zones. ISBN 978-2-35522-122-4. Dispo à la Biblinsa : 305.42 CHO